Décès accidentel d’un bébé à la crèche «Cigogne bleue» : crise sociétale et invitation au pardon (Part 2 et fin)

Le décès accidentel de ce bébé de 10 mois pose une question de fond sur une évolution négative de notre société, à savoir, des femmes de plus en plus indisponibles pour leurs enfants.

En ces temps où l’actualité nous donne à voir de plus en plus de filles et femmes de ce pays qui empruntent le chemin de l’argent facile, du chantage, et autres comportements qui remettent en cause nos valeurs de base, ne devrait-on pas faire œuvre de solidarité et d’indulgence sans tomber dans le laxisme, à l’égard de ces femmes qui entreprennent et qui gagnent dignement leur vie en délivrant des services si délicats aux enfants d’autrui ?

A quoi bon ajouter de la souffrance à la souffrance de ce personnel et de leur responsable certainement meurtris par le décès accidentel de ce bébé qui était aussi le leur ? Pendant combien de temps ce personnel s’est-il occupé de ce bébé comme d’autre sans qu’il y ait eu accident et combien de fois les parents sont-ils venus ravis de le revoir et tout heureux de le ramener à la maison ? Faut-il oublier tout cela et conduire ces femmes au tribunal où elles risquent la prison déjà que moralement et spirituellement, elles ne vont pas bien très certainement depuis ce tragique et regrettable accident ?
Au cas où elles écopent d’une peine de prison, cela fera-il revenir le défunt bébé qui est parti rejoindre son Seigneur affranchi de nos péchés d’adulte ?
A quoi bon rajouter de la souffrance à la souffrance de ces femmes et de leurs familles ?
Une démarche consistant à réunir les parties prenantes dans ce drame, en première ligne les parents éplorés et le personnel de la crèche en cause, avec l’accompagnement de l’imam ou du prêtre, d’un communicateur traditionnel, d’une Bajènu Gokh, d’un psychiatre et autres personnes qualifiées pour intervenir dans ce genre de crise aurait pu éviter la judiciarisation de l’affaire. Hélas, de plus en plus, nous tournons le dos à des procédures traditionnelle et religieuse (qui ont fait leurs preuves) de pansement des blessures morales que nous nous infligeons les uns les autres. Une telle rencontre aurait pu permettre aux parties prenantes de s’exprimer, de s’écouter et aux médiateurs de trouver les mots pouvant inciter les parents éplorés à accorder leur pardon au personnel de la crèche qui ne se gênerait pas du tout de le solliciter. La crise sociétale et des valeurs dont on parle se révèle à travers cette marginalisation consciente ou non des atouts dont dispose notre société.
C’est en temps d’épreuve comme celle-ci que le Coran invite les personnes affectées à faire preuve d’une belle endurance et de pardonner même pour des cas de fautes volontaires et à fortiori quand il s’agit d’erreurs et d’accidents : « (…) Qui dominent leur colère et pardonnent à autrui. Allah aime les bienfaisants » (Coran 3 : 133) ;
« Qu’ils pardonnent et qu’ils passent outre ! Ne souhaitez-vous pas, vous-mêmes, qu’Allah vous pardonne ? Et Allah est Pardonneur et très Miséricordieux » (Coran 24 : 22) ;
« Et celui qui endure et pardonne, cela en vérité, fait partie des bonnes résolutions » (Coran 42 : 43).

Tout ce qui précède nous semble assez raisonnable pour inviter les parents éplorés à retirer leur plainte pour que si possible s’arrête la procédure judiciaire en cours contre le personnel de la crèche en cause, ou atténuer la peine encourue, et à pardonner pour la face de Dieu.
Pardonner ne veut pas dire oublier ni cautionner des négligences mais se dire que c’est une vertu des proches et bien-aimés de Dieu qui ne se lasse de nous pardonner nos péchés volontaires ou non.

Pour finir, il faudrait d’une part, rappeler aux pouvoirs publics leur responsabilité relativement à la bonne gouvernance de ces structures et de ces personnels qui délivrent des services aux personnes notamment aux enfants et aux bébés en termes de validation et de contrôle pour un cadre décent et des qualifications en bonne et due forme. D’autre part, Il urge de réhabiliter nos procédures traditionnelle et religieuse de résolution des crises d’ordre social. Aux parents aussi d’être regardant et de bien se renseigner avant de confier leurs enfants à une structure qui pourrait ne pas être la bonne.

Imam Ahmad Kanté